Se lever tôt le matin, travailler la nuit, avoir un métier physique ou des journées longues… Concilier Ramadan et activité professionnelle n’est pas toujours facile. Cependant, la foi permet de redoubler d’efforts. Des jeûneurs se confient.
Afif, 52 ans, chauffeur-éboueur
« Gérer la fatigue et me réveiller tôt pour aller travailler… Voilà le plus dur pour moi. Mon rythme de travail est contraignant. Il l’est encore plus pendant le ramadan parce que l’on a tendance à se coucher tard. Je me lève tôt, pour le shour, puis je pars travailler. Je n’ai pas le temps de prier Al Fajr. Je commence à 5 h 30 pour finir à 13 h 30. Quand je rentre, je suis fatigué, alors je fais une sieste. Je n’ai pas le même rythme que mes proches, c’est difficile, mais j’essaie de profiter au maximum d’eux, d’aider ma femme pour les tâches ménagères et pour recevoir des invités. Ce n’est pas toujours facile, mais la foi en Allah me fait tenir. »
Djamila, 25 ans, infirmière
« J’exerce mon métier la nuit, alors je romps le jeûne au travail. J’embauche à 20 h 45 et débauche à 7. Je m’organise avec mes collègues pour prendre ma pause le plus tôt possible et ne pas manger trop tard, après la prière du Maghreb. Pas toujours évident. Je prends au moins des dattes à l’heure du ftour, toujours, pour me donner un peu de force. Le plus difficile ? Ne pas manger avec mes proches, car ma famille a un rituel pendant le ramadan : nous nous réunissons tous chez ma grand-mère pour rompre le jeûne ensemble. Or je manque à l’appel depuis deux ans. Nous sommes trois infirmières dans mon service et mes collègues ne jeûnent pas. Heureusement, l’une d’elles s’est proposée pour manger avec moi et éviter que je sois seule. Le repas est plus convivial, et j’apprécie de partager ma chorba avec elle. La journée, j’essaie de me lever avant 14 heures, histoire de ressentir l’ambiance du ramadan. »
Assya, 30 ans, téléconseillère
« Le plus difficile ? Passer ma journée à parler au téléphone sans pouvoir boire. Je travaille dans un “ open space ” qui recense entre 60 et 70 personnes. Pendant le ramadan, j’ai l’impression que le chiffre double. Tous mes sens sont démultipliés : l’ouïe, l’odorat… Et puis il y a la fatigue. Je dois redoubler de patience lorsque j’ai des clients en ligne. Alors je m’offre une pause au calme, dans ma voiture, pendant la pause de midi. Je ferme les yeux et j’écoute le Coran. Mes journées sont longues : je finis à 19 heures. Le temps de rentrer à la maison et de rattraper mes prières, il reste peu de marge pour préparer à manger. Ce qui me fait tenir le coup ? L’ambiance que l’on a créée avec mes collègues musulmans. On partage nos savoirs et nos lectures. On échange aussi les spécialités de nos pays d’origine. »
Kheira, 50 ans, agent de service
« Je travaille dans un hôpital où je nettoie les parties communes, de 5 heures à 9 h 45, puis de 12 heures à 13 h 30. Entre le jeûne, le travail et les tâches domestiques, mes journées sont intenses : un sprint sans pause. Je me lève à 4 heures. La fatigue reste la chose la plus dure à gérer. J’essaie de faire une petite sieste quand je rentre, sinon je ne tiens pas le coup ! Puis je prépare le repas, chaque soir pour six personnes. Je me couche tout de suite après le ftour, pendant que mon mari et mes enfants débarrassent. Je regrette de ne pas avoir assez de temps pour lire plus le Coran. »
Nedjid, 54 ans, gérant d’une salle de sport et de combats
« J’adapte mon rythme de travail pour tenir le coup. Je conduis mes cours normalement, même si je réduis ma dépense physique en privilégiant les explications orales aux démonstrations physiques. J’organise différemment mes horaires aussi : je commence plus tôt et je termine 30 minutes avant le ftour. Préserver un sommeil réparateur reste le plus difficile. Je ne ressens pas trop la soif, mais j’ai parfois des coups de mou ; surtout les premiers jours. La foi me permet de tenir bon toutefois. »