Nej’, c’est le surnom que lui donnaient ses grandes sœurs quand
elle était enfant. Que de chemin parcouru depuis… En 2022, Nej’ a délaissé ce chapeau
qu’elle portait à ses débuts pour préserver son intimité. Elle s’est ouverte au monde.
Plus rien aujourd’hui ne semble lui résister. Disques, tournées, son
parcours est hors norme. Et elle le doit d’abord à elle-même.
“Mes sœurs chantaient et écoutaient beaucoup de musique à la maison. J’ai baigné dans cette atmosphère. Plus jeune, j’adorais Céline Dion, Michael Jackson, Beyoncé…
Au départ, la petite toulousaine ne rêve pas forcément de devenir une chanteuse. Ça ne
l’empêche pas de chanter, souvent, avec ses amies, sans arrière-pensée, pour le plaisir : “Je kiffais chanter dans mon bloc, parce que ça résonnait, l’acoustique était idéale. Mes copines adoraient ça”…
Le destin va s’en mêler. Nej’ a un voisin. Un voisin avec de bonnes oreilles et qui dirige une association culturelle. Cette adolescente qui fait vibrer les cages d’escalier a quelque chose. Indéniablement. Grâce à lui, Nej’ ouvre la porte de son premier studio. Un peu plus tard, un ami beatmaker lui tend aussi la main : “Je me souviens, j’étais sur le point de lâcher la musique, je travaillais énormément, j’étais épuisée… Mais j’accepte sa proposition et me voilà partie en studio. J’y reste plusieurs jours. Je rencontre Hakim, mon producteur actuel.”
Autre tournant. Elle a 16 ans. Lors d’une journée associative autour du tennis à Toulouse organisée par son voisin, elle croise la route d’un certain… Yannick Noah.
Très vite séduit par la voix de Nej’. “J’aimerais bien que tu chantes avec moi sur scène “Je suis Métisse”, au Zénith de Toulouse…” lance-t-il sans prévenir. Nej’ a du mal à y croire. Elle sait que les promesses riment parfois avec désillusions… Mais non, Noah était sérieux. Et, quelques mois plus tard, le rêve s’incarne. “Je me souviens de la foule, de toutes ces lumières, lui en train de danser pieds nus sur scène, les musiciens, c’était impressionnant ! Magique ! J’en tremblais, autant de stress que d’excitation. J’en garde un merveilleux souvenir. Et je pense que ce concert a déclenché en moi ce désir de me produire en live. De devenir chanteuse en fait…” Ce qu’on appelle un déclic.
En 2014, il y a son duo avec Mister You sur “Emmène Moi”. En 2016, elle balance un remix du “Validée” de Booba, enregistré à 5 heures du matin et mis en ligne dès 18 heures le même jour. Des centaines de milliers de vues. Son premier succès.
À 18 ans, elle quitte son Toulouse natal pour Paris. Elle a soif d’aventure. Elle veut voir le monde, le saisir pour ne rien regretter. Elle n’a pas peur. Intrépide, elle enchaîne les petits boulots, rien ne la décourage. Elle a toujours préféré le saut dans l’inconnu aux habitudes qui éteignent. “J’ai rencontré beaucoup de galères mais j’ai su retomber sur mes pattes” dit-elle avec une pudeur qui en dit long sur sa ténacité et son courage. “Aujourd’hui, je suis totalement épanouie, j’adore ce que je fais. La chanson, c’est un pur plaisir, elle a eu sur moi un effet libérateur. C’est plus une thérapie qu’autre chose ! ”
Vont suivre quelques singles, un premier album en 2019, plusieurs EP’s. De multiples collaborations avec Naps, Lartiste, Zaho, Niro, YL, Lefa, Franglish et Vegedream…
Elle y est. La chanson est devenue sa vie. Toute sa vie. En 2021, il ne faut évidemment pas oublier la chanson “Paro”. Avec plus de 9 millions de vidéos sur Tik Tok, le titre s’est
hissé à la 11e place du Top Shazam Monde. Au final, plus de 72 millions de streams sur Paro, 30 millions de streams sur Paro – Speed Up et Nej’ détient même un record mondial sur YouTube Shorts (chiffres à 2022).
Qui dit mieux ? Jusqu’à ce “S.O.S chapitre 3” et ses dix titres. Nej’ a un vrai avantage : celui d’avoir une voix qui ne triche pas. Son registre vocal lui permet d’aller où elle veut quand elle veut.
Pop urbaine, R&B, chanson, les étiquettes chez elle s’envolent avant de disparaître. Nej’
chante en toute liberté. On la sent capable de toucher à tout sans jamais se perdre. Elle rêve, par exemple un jour d’enregistrer un titre en arabe littéraire, pour honorer ses racines marocaines. Elle ne s’interdit rien et le temps joue pour elle. Sur ce disque sans frontière, capable de noircir bien des pistes de danse comme de viser les coeurs et les âmes, on la retrouve habitée, aérienne, solaire, profonde, amoureuse, déchirée ou combattive. Traversée par ces paradoxes qui font l’humanité. Admirablement éclectique.
Quand Nej’ parle de ses nouvelles chansons, dont elle écrit toutes les paroles, elle a les yeux qui brillent. On devine sa fierté et son envie de les défendre sur scène.
Son impatience. Ce sera à l’Olympia le 18 et 19 décembre 2022. Pour deux dates déjà sold out, tous les billets sont partis en à peine 24 heures. Elle avait déjà blindé la Cigale sur deux jours quelques mois auparavant…
En attendant Bercy en 2023 ? Elle en rêve… Nej’ l’avoue : elle aime le défi, elle aime savoir de quoi elle est capable. Tester ses propres limites. De quoi est fait ce “S.O.S chapitre 3” ? Nej’ nous sert de guide : “Irréel”, je l’aime tellement ce titre. Ça parle d’amour. Je m’y livre comme jamais. J’en dis beaucoup. Je suis très explicite. C’est une chanson douce, profonde, majestueuse d’une certaine façon, avec des violons… ” dit-elle. Elle a raison. “Rivaliser”, j’adore aussi ce titre (rires). J’aime son côté presque dance hall. J’aime bien quand je pars en egotrip sur l’intro. Très cool très chill”. “Ma Raison” est un single imparable. Nej’ chante sur ce titre une femme éperdument amoureuse d’un homme et les contradictions qui vont avec. “Toi + Moi”, avec un feat de Franglish, groove comme il faut, avec ses basses rondes et son esprit R&B acoustique impeccable.
“Chelou”, je l’ai réécrit au cœur de la nuit. À la base, il ne ressemblait pas du tout à ça. Il
porte bien son nom (rires). Il a un côté très instinctif…”. “Pourquoi Pas”, il me fait planer ! Il y a du soleil, de la douceur, de l’amour, comme je le kiffe ce titre (rires) !”. Dans “Inta Habibi” où elle alterne français et arabe, on peut l’entendre chanter “J’vais te raconter mon histoire”. “Ce titre, je ne sais pas pourquoi, quand je le chante ou que je l’écoute, je me vois petite fille sous la neige…” Cette chanson, c’est une comptine qui réchauffe les cœurs, un prolongement de l’enfance… Une magie réactivée. “Donne-Moi” chante l’interdit, l’aventure, l’inconnu.
Nej’ se livre, encore. C’est sa façon d’être. Préférer à un hypothétique futur un présent qui ouvre des portes, qui libère des mystères, qui dessine de nouveaux chemins. “Bonheur du Monde” marque la fin d’un amour, même s’il respire encore. C’est un adieu bienveillant, l’acceptation de la conclusion d’une belle histoire. Un moment comme en apesanteur. Émouvant. Enfin, “Ça va Aller”, qui clôt l’EP, est un hymne au panache, aussi à une certaine fatalité “Là, je dis que plus rien ne m’atteint. J’en ai tellement vu, tellement pris dans la face que ça y est, je suis immunisée. C’est la vie, c’est comme ça, il faut avancer, quoiqu’il arrive…”. Nej’ peut regarder l’horizon droit dans les yeux. En attendant peut-être un jour de partager la scène avec Céline Dion. L’un de ses rêves de gamine toujours pas effacé. Elle peut y croire. Elle a ce qu’il faut.